Comme c'est curieux !
Dans sa propagande en forme de méthode Coué, le CRAC, comme le célèbre malabar de foire de la Strada, ne rate pas une occasion de faire passer sa gonflette pour de vrais biceps. "On vous attend devant le Conseil d'État", tonne-t-il donc comme le vieil Horace, omettant toutefois de préciser qu'il vient d'y prendre une râclée.
Souvenez-vous : en août 2013, quelques jours avant la feria du Riz arlésienne, le CRAC demanda en référé au Tribunal administratif de Marseille d'en interdire la tenue, alléguant une série d'arguments plus farfelus les uns que les autres, dont un tiré du code rural et de la pêche maritime. Ses théoriciens avaient cru déceler une faille dans la législation qui leur permettrait enfin d'obtenir cette décision dont ils rêvent. Le référé fut bien sûr rejeté en première instance, et, faute de jugement au fond le CRAC, comme le malabar de foire dont il est question, s'adressa au Conseil d'État à qui il demanda "d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet" (déjà le terme implicite avait son importance), et, excusez du peu, "d'enjoindre au Premier Ministre de prononcer cette abrogation dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir".
Le Conseil d'État a pris son temps, mais Zampano n'a pas été déçu. Le 2 février dernier, ses 3ème et 8ème sous-sections réunies ont décidé dans l'article premier de l'arrêt 373736 (lire) que "la requête de l'association Comité radicalement anti-corrida est rejetée".
Curieusement, alors qu'il est si prompt à commenter les décisions de Justice, le CRAC n'a pas moufté quand celle-ci est tombée, hébété peut-être par ce KO technique que son penseur n'avait pas anticipé, tellement il est persuadé d'etre infaillible. Le résultat est pourtant là : ayant à statuer une fois de plus sur le délicat sujet de l'exception culturelle dont bénéficie la corrida dans la législation, le Conseil d'État, comme le Conseil Constitutionnel, a maintenu le statu quo.Et dans quelques mois, il le redira, confirmant qu'il n'y a pas eu "abrogation implicite" de l'inscription au PCI.
André Viard dans Terres Taurines, édito du 23 juin 2015