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Après l'incendie des arènes en bois du terrain Palazy* survenu le dimanche 6 septembre 1896 provoqué par un nommé Neurisse, M. Fayot, ancien directeur des arènes de Nimes, rencontre en novembre 1896 le maire de Béziers Alphonse Mas pour lui faire part d'un projet de construction d'arènes d'une capacité de 12 500 voire 15 000 spectateurs sur le lieu actuel, le plateau de Valras. Un accord de construction est passé avec deux entrepreneurs biterrois MM Gleizes et Sautel. Les travaux débutent le 18 janvier 1897. L'objectif fixé aux 250 ouvriers du bâtiment est de terminer les travaux pour juin/juillet de la même année. En juin, si une portion des arènes sont en bois, l'enceinte et une grande partie des étagères – pierres, briques, ciment – sont terminées. La commission extra-municipale vient d'être créée et adopte le premier règlement taurin de la ville de Béziers qui est signé par l'empresa des arènes M. Fayot.

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Avant l'inauguration du lieu fixée au 11 juillet 1897, le ruedo biterrois accueille le 27 juin « une novillada de muerte » avec 6 toros du Petit-Badon et le 4 juillet, 6 toros de la ganaderia de Paul Viret. L'inauguration du 11 juillet à 4 heures de l'après-midi comporte, face à 6 toros d'Enrique de Salamanca, les matadors Reverte et Algabeño. Les arènes sont combles. Le lendemain« Pica » un revistero local conclue sa rubrique par « En somme bonne corrida, qui a laissé sur le public une excellente impression. » Hélas, trois jours après, Reverte et Algabeño - le 14 juillet - seront mal servis par les 6 toros de Salas.

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Quatre autres corridas intégrales ont lieu l'année de l'inauguration, comme le 19 septembre où six Veragua seront tués par Lagartijillo et Quinito. La première temporada des nouvelles arènes se termine le 3 octobre par le triomphe de Gueritta et de Torerito estoquant parfaitement les six toros de Don Rafael Rodriguez… La même année le 12 octobre à Béziers, lors de son 1er congrès la "Fédération des Cités du Midi » ancêtre de la FSTF et de l'UVTF adopte ses statuts comprenant notamment la défense des courses de taureaux. En choisissant Béziers la Fédération rendait ainsi un hommage à l'Aficion biterroise et à ses nouvelles arènes.

L'année 1898 débute mal pour la Société Gleize-Sautel-Fayot avec la mésentente des deux premiers avec l'empresa Fayot : les résultats financiers ne permettent pas de terminer la construction du bâtiment et en février tout ce monde se retrouve au Tribunal de commerce de Béziers. Cela n’empêche pas la temporada de 1898 de débuter - toujours sous la direction Fayot - le 24 avril, avec Lagartijillo et Minuto, puis cinq corridas les 29 mai avec Pepe Hillo, 19 juin, 2 juillet où le grand Mazzantini combattra avec Bonarillo six Toros de Concha y Sierra, le 9 octobre et 23 octobre entrecoupées d'un spectacle équestre, d'une novillada le 18 septembre et de deux becerradas…

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 matadors beziersMais si les journalistes taurins baptisaient Béziers du nom de « Séville française », d'autres allaient la nommer le « Bayreuth français » ; ceci grâce au mécène biterrois Castelbon de Beauxhostes amoureux du lyrique  Laissons lui la plume.: « Ce fût lors d'un voyage à Valence (Espagne) que l'idée me vint d'organiser une représentation dans les arènes de Béziers. J'assistais naturellement à l'inévitable course de taureaux ; il me fût donné aussi d'entendre un concert vocal et musical qui me stupéfia. Dans les arènes (…) des chœurs impeccablement réglés et des solistes à la voix harmonieuses venaient, seuls et délicieusement, troubler le silence de l’amphithéâtre, cependant garni jusqu'au moindre gradin. (…) Je n'eus plus de repos qu'un essai véritable n'ait été tenté... ». Il ne restait plus qu'à Castelbon de Beauxhostes de convaincre Camille Saint-Saëns, ce qui fût fait musicalement dans les arènes un soir de mai 1897… et le 28 août 1898 Déjanire ,sous la direction de Saint-Saëns, était joué. Ce fût aussi cette année là que Castelbon de Beauxhostes, aficionado, suggéra de créer la Société Tauromachique de Béziers ancêtre de l'Union Taurine Biterroise d'aujourd'hui.

La gestion et les difficultés financières pour terminer les arènes de Béziers, amenèrent le 20 février 1899 la Cour d'appel de Montpellier à confirmer le jugement du Tribunal de commerce de dissoudre la société Gleizes-Sautel-Fayot ; ce dernier, « du fait d'une gestion désastreuse » était condamné à tous les frais de 1ere instance et d'appel. MM Gleizes et Sautel choisissent alors le directeur des arènes de Nîmes M. Dide pour monter les cartels des cinq corridas espagnoles de 1899. Le Maestro Mazzantini commence le 23 avril la temporada avec à ses cotés Conejito face à des Miura. Le 8 octobre, Guerrita fait sa corrida de despedida en France après avoir combattu des trois toros de Banuelos en compagnie de Bombita et Guerrita.

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Fait exceptionnel pour l'époque, cette corrida est filmée par deux cameramen des Frères Lumières ; cela permettra, lors de nombreuses projections, avec trois films d'environ 10 minutes, de faire découvrir la corrida en France et en Europe. De nombreuses cartes postales reproduiront des images de ces films.

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 En 1900, le bâtiment est toujours inachevé. M. Chancel qui aidait financièrement les travaux déjà entrepris émet 34 actions de 1 000 francs donnant droit à l'occupation d'une loge pour une durée de 20 ans. Cet apport financier permettra à l'architecte Carlier d’exécuter les travaux - dont ceux des loges - pour terminer les arènes en 1901. Si cette année là deux opéras triomphaient dans les arènes, ce ne fût pas le cas pour la Tauromachie : une seule véritable corrida ! et une novillada dite de competencia ! Pire aucune en 1902 ! Par contre débutait une longue série de spectacles populaires dits taurins montés par François Séguier. Heureusement pour l'aficion qu'il y eut l'année suivante la corrida du 11 octobre 1903 avec Fuentes et Chicuelo avec des toros de Moreno Santamaria clôturant les journées qui virent la fondation de la Fédération Méridionale des Sociétés Taurines appelée communément le « Bloc Taurin ». Ce « Bloc » regroupait toutes les villes taurines du Midi et leurs associations pour passer outre aux interdictions et défendre la tauromachie attaquée par la SPA. Si en 1904, la Ville de Béziers attribuait à Castelbon de Beauxhostes la gestion artistique des arènes contre une redevance annuelle de 4000 francs reversée à Gleizes et Sautel, l'organisation tauromachique confiée à M. Cauba n'apportait que deux corridas. Celle du 2 octobre fût un succés ; 13 000 spectateurs pour voir et applaudir Fuentes, Montes et Gallito. C''est à la suite de cette journée que Béziers reçu le titre de « Séville française ».

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Mis à part les spectacles populaires de M. Séguier rencontrant de vifs succès - jusqu'à 15 000 spectateurs sur les gradins - mais révulsant les aficionados - il faudra attendre 1909, avec le choix des directeurs des arènes de Toulouse par le nouveau propriétaire des arènes M. Chanel, et surtout 1910, pour que la qualité des corridas avec la bravoure des toros de Don Carlos Conradi y Galin, de ceux de Villagodio, puis les Veragua ramène les aficionados aux Arènes.

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De juin 1897 à 1911 les Biterrois assistèrent notamment à 67 spectacles taurins – corridas avec tous les grands Maestros de cette époque ( Lagartijillo, Reverte, Guerrita, Pepe Hillo, Mazzantini, Bombita, Bienvenida…), novilladas, becerradas, capea, courses provençales (avec les Pouly père et fils) et landaises, ; à dix neuf opéras (Camille Saint-Saëns, Gabriel Fauré, Herold, Bizet, Spontini, Gluck, Sicard...); à une chasse à courre en mars 1904 ; à un spectacle des « Folies Bergères »… Sans oublier un meeting unitaire des socialistes le 30 avril 1905 avec Jaurés, Jules Guesdes, Viviani, Cachin et le 2 juillet 1905 un rassemblement des viticulteurs mécontents. Durant la révolte des vignerons du Midi en 1907 les arènes hébergèrent un régiment de Dragons…

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Les arènes après 1911 connurent quelques vicissitudes malheureuses ( plus de corridas, malfaçons, guerre de 14/18...). Il fût même question en 1911 et 1912 de les détruire. Heureusement en 1919, grâce aux actives démarches de la Société Tauromachique, de MM Azais et Gaillard président de la Chambre de commerce, fût créée la Société Immobilières des Arènes, toujours existante, permettant de retrouver à la mi-mai 1921 une plaza remise en état telle que nous la connaissons aujourd'hui. Une seconde inauguration eût lieu le 29 mai 1921 avec les maestros Luis Freg, Saleri II et Limeño face à 6 toros de Veragua. Les arènes de Béziers étaient définitivement implantée. 

1921

 De 1921 au 2 juillet 1939, les aficinados assistent chaque année à des corridas en général de hautes te­nues. Des corridas de plus en plus différentes de celles d'avant 1911. Les toros changent de poids et de taille permettant aux matadors de prolonger la faena avec un style « artistique » inspiré en Espagne par Belmonte, concurrencé par Joselito. Une nouvelle géné­ration de toreros foule le sable biterrois comme Martial Lalanda, Chicuelo, Luis Freg, Saleri II.

beziers1952De 1947 à 1968, Arruza, Conchita Cintron, Bienvenida, Luis Miguel Dominguin, Aparicio, Ortega, Chamaco, Ordoňez, El Cordobes et beaucoup d'autres font le paseo dans des arènes plus ou moins pleines. Il man­quait quelque chose pour retrouver un vaste public. Jules Faigt, adjoint au maire proposa pour 1968 la mise en place d'une Feria avec festivités et naturellement tau­romachie. L'idée était bonne. Le public répond présent pour applaudir notam­ment les Paco Camino, Paquiri, Niñode la Ca­pea, Ruiz Miguel, Manzanares, Nimeño II, Victor Mendes, Rincón,Richard Milian, Ojeda, Oliva, Espartaco... pour finir aujourd'hui avec entres autres les Castella, Juli, Ponce, Bautista, Padilla, Rafaellilo...

 

* ces arènes succédaient à celle du Champs de Mars (place du 14 juillet) 1859 à ? - puis à celles du terrain Benêt 1877 et à celles du quartier de l'Abattoir 1882 - 1885